Article réalisé en collaboration avec Guillaume Micolau, notaire spécialisé sur les questions patrimoniales internationales.
Attention, les règles fiscales en matière de donations entre américains et français sont soumises à interprétation. Les notaires et comptables ne sont pas toujours d’accord sur la question. Les scénarios ci-dessous sont donc donnés à titre informatif. Pour être complètement sûr du traitement fiscal, il est fortement recommandé de demander un rescrit fiscal à l’administration française.
Cet article couvre les principaux scénarios liés aux règles fiscales applicables aux donations pour les résidents américains (français titulaires de certains visas, français en greencard ou citoyens américains).
Combien pouvez-vous donner ou recevoir de quelqu’un ici ou en France avec ou sans dépôt de documents auprès de l’IRS ou du fisc français ? Cet article est à titre informatif uniquement et ne constitue pas un conseil fiscal ou financier. Veuillez consulter un professionnel en France et aux États-Unis, car chaque situation est unique.
Scénario 1 – Donation d’un résident américain à un résident américain
En tant que résident américain, vous pouvez donner 15 000 $ par an à tout autre résident américain sans avoir à remplir de document particulier. Si vous voulez donner plus de 15 000 $, vous pouvez donner jusqu’à 11,7 millions de dollars sans payer d’impôts, mais vous devrez alors remplir le formulaire américain 709.
11,7 millions de dollars est l’exonération dont vous bénéficiez pour toute votre vie : soit par le biais de donations, soit au jour de votre décès. Ainsi, le montant que vous donnez en plus des 15 000 $ par année sera soustrait de ces 11,7 millions de dollars (2021).
Scénario 2 – Donation d’un résident américain à un résident français
Il faut distinguer deux cas : celui où la convention fiscale franco-américaine de 1978 sur les donations (et les successions) s’applique et celui où elle ne s’applique pas.
La convention franco-américaine s’applique si le donateur (celui qui donne) est citoyen américain ou résident américain (français en greencard). Si le donateur est sous visa, rien n’est certain et tout dépendra du nombre d’années passées aux États-Unis.
A. La convention franco-américaine ne s’applique pas.
Côté américain, les règles relatives aux donations par des résidents américains suivent les règles du scénario 1.
Côté français, la donation d’une somme d’argent en provenance des USA sera taxable si, au jour de la donation, celui qui reçoit les fonds (le donataire) est résident fiscal français, et l’a été pendant au moins six années au cours des dix dernières années précédant celle au cours de laquelle il reçoit les fonds. Si en revanche le donataire est résident de France depuis moins de six ans, alors l’opération n’est pas taxable en France.
Dans l’hypothèse où la donation serait taxable en France, le taux d’imposition français dépendra alors du lien de parenté entre le donateur et le donataire. Ce taux sera appliqué après déduction d’un « abattement fiscal » (somme que l’on peut transmettre gratuitement). Cet abattement se renouvelle tous les 15 ans :
- 100 000 euros par parent et par enfant (par exemple, pour une famille de 4, soit 2 parents et 2 enfants, le cumul des abattements atteint 400 000€).
- 31 865 euros par petits-enfants et par grands-parents,
- 5 310 euros par arrière-petits-enfants et par arrière-grands-parents.
Dans ces 3 cas, il y a ensuite application d’un barème progressif de 5% à 45% au-dessus du seuil de l’abattement.
- 15 932 euros par frère/sœur puis 35% (en dessous de 24 430 euros) et 45% (au-dessus de 24 430 euros),
- 7 967 euros par nièce/neveu puis 55% d’impôt au-dessus de ce seuil.
Le résident français a en tout état de cause un mois pour déclarer la transaction et payer les droits de donation via le formulaire français 2735 (« déclaration de dons manuels et de sommes d’argent »).
À noter que si la donation porte sur un bien immobilier situé en France vous devrez obligatoirement passer par un notaire en France pour l’enregistrer. L’opération sera par ailleurs toujours taxable (mais pas forcément taxée si le montant donné est en deçà des abattements précités) la règle des six années évoquée précédemment ne trouvant pas à s’appliquer pour la donation d’un bien immobilier situé en France.
B. La convention franco-américaine s’applique
Si la donation porte sur une somme d’argent, elle sera uniquement taxable aux États-Unis (au-dessus de $11,7M par personne), selon les règles du scénario 1. Idéalement, la donation devra être matérialisée aux États-Unis (de toute façon si supérieure à 15 000 $) via un formulaire 709 et en France par le donataire (formulaire 2735) quelle que soit la somme, avec un courrier expliquant pourquoi l’opération n’est pas taxable en France.
Si la donation porte sur un bien immobilier situé en France elle sera toujours taxable en France (abattement et taux précités) et l’intervention d’un notaire est requise.
Scénario 3 – Donation d’un résident français à un résident américain
La convention fiscale trouve en tout état de cause à s’appliquer ici. Elle précise que la donation d’une somme d’argent au profit d’un résident US est taxable en France, selon les abattements et taux précités. Le résident français doit alors la déclarer (formulaire 2735 ou acte notarié).
Si la donation porte sur un bien immobilier situé en France, elle sera toujours taxable en France (abattement et taux précités) et l’intervention d’un notaire est requise.
Côté US, le résident américain doit déclarer la donation dont il a été bénéficiaire via le formulaire américain 3520 si la donation est supérieure à $100 000, mais il ne paiera pas d’impôts sur celle-ci.
Existent-ils d’autres moyens de transmettre à moindre coût ?
Utilisez le « don familial » (qui ne peut porter que sur des sommes d’argent) :
en plus des abattements traditionnels précités qui dépendent du lien de parenté, vous bénéficiez d’un abattement supplémentaire de 31.865 € (se renouvelant également tous les 15 ans) si vous êtes âgé de moins de 80 ans au jour du don et si la personne recevant le don est majeure ou mineur émancipé au jour du don. Cet abattement peut bénéficier à vos enfants, petits-enfants ou arrière-petits-enfants, ou à défaut de descendance, aux neveux et nièces et, en cas de décès de ces derniers, à vos petits-neveux ou petites-nièces.
Cela signifie que deux parents peuvent donner à leur enfant un total de 263 730 euros tous les 15 ans sans payer d’impôts (100K x 2 + 31.865 x 2).
La déclaration du don familial de sommes d’argent est formalisée par le dépôt du formulaire 2735 dans le mois qui suit la date du don.
Pensez au « présent d’usage » ! Le montant doit être faible par rapport au patrimoine et revenus du donateur. Selon la jurisprudence, il doit être inférieur à 2,5% du revenu du donateur et 2% de son patrimoine et doit être remis à l’occasion d’un événement spécifique (anniversaire, Noël, réussite à un examen, etc.). Il n’a pas besoin d’être enregistré.
Il existe également une exception pour le PEL que vous pouvez abonder jusqu’à 61 200 euros pour votre enfant de moins de 18 ans, sans que cette somme soit considérée comme une donation.
N’hésitez pas à bloquer mon calendrier si vous voulez discuter de votre situation particulière.
Votre conseiller,
Guillaume